mercredi 3 juin 2015

L'appel de Cthulhu - rencontre avec le sombre tentaculaire...

L'Appel de Cthulhu, de H. P. Lovecraft


Deux textes essentiels du créateur de célèbre mythe de Cthulhu, qui a inspiré tant d'auteurs de littérature fantastique. L'Appel de Cthulhu: Au fond de l'océan, dans la cité maléfique de R'lyeh, l'infâme Cthulhu sommeille en attendant d'imposer so règne sur la Terre, tandis que ses disciples préparent son retour.La malédiction qui s'abattit sur Sarnath: Les créatures étranges qui peuplaient l'antique cité ont été massacrées par les nouveaux arrivants. Leur vengeance sera terrible.

  Infos complémentaires:
  Titres originaux: 
               The Call of Cthulhu (1926) 
               The Doom that Came to Sarnath (1919)  
  Origine: Etats-Unis 
  Traduction par Michel Marcheteau et Michel Savio (2013) 
  Edition: Pocket - Bilingue (2013) 
  160 pages  






Je connaissais déjà quelques écrits de Lovecraft, et si j'étais un peu familier avec tout ce qui entoure le mythe de Cthulhu et les Grands Anciens par le biais d'autres oeuvres, auteurs, voire même supports, je ne m'étais pourtant jamais vraiment intéressé au texte fondateur de la "légende": L'Appel de Cthulhu. A vrai dire, cela fait plus d'un an déjà que j'ai fait l'acquisition de ce livre, mais pour une raison que j'ai aujourd'hui totalement oubliée, je l'avais laissé de côté en pleine lecture, pour finalement le reprendre et le terminer il y a seulement deux petites semaines. Autant vous le dire tout de suite: si ce fut une lecture sympathique, je n'en garderai pas un souvenir impérissable.


L'Appel de Cthulhu (1926)


L'Appel de Cthulhu nous met en présence d'un jeune homme dont nous ignorons tout, qui fera office de narrateur. Suite au décès de son grand-oncle, il se retrouve en possession d'étranges documents, qui le mèneront sur la piste d'un culte dédié à un ancien dieu païen sur le point de renaître: l'infâme Cthulhu. Dans cette nouvelle, on suit l'investigation de ce jeune homme, celui-ci faisant le récit des documents et des témoignages qu'il rassemble, et la manière dont il les a obtenus. Si au début, il reste assez incrédule face à ce qu'il apprend, et qui reste assez abstrait, les preuves deviennent de plus en plus concrètes. Lovecraft parvient bien à instaurer cette atmosphère qui se fait de plus en plus pesante, étrange; cette "folie", comme le dit si bien le narrateur. Le récit m'a d'ailleurs fait penser plusieurs fois au Horla de Maupassant, non seulement par la narration sous forme de chronique, mais aussi cette ambiance particulière où l'horreur vient se mêler au réel jusqu'à ce qu'on ne parvienne plus à les discerner. L'écriture de Lovecraft se prête d'ailleurs tout à fait à cet exercice, elle réussit à se faire oppressante. A ce titre, je vous recommanderais plutôt une édition en V.O. ou, si vous n'êtes pas suffisamment familier avec la langue des Monthy Python, une édition bilingue - comme moi, quoi. La traduction française permet certes de profiter du texte dans sa globalité et de comprendre de quoi il ressort, mais elle n'a pas cette lourdeur qu'a le texte d'origine.

Personnellement, si je trouve ce texte très intéressant pour ce qu'il représente, à savoir la naissance du mythe de Cthulhu, je suis un peu plus mitigé en ce qui concerne ce qu'il est en lui-même. J'ai apprécié à ma façon l'ambiance pesante que Lovecraft cherchait à instaurer, ainsi que l'écriture qui en est le vecteur. Par ailleurs, j'ai trouvé très intelligente cette façon de ne décrire son "mythe" que par étapes, en passant progressivement de l'abstrait au concret, du rêve à l'horreur, et jamais complètement. Finalement, on devine plus qu'on ne voit, et c'est peut-être ce qui est le plus propice à l'imagination, qui elle, va amener l'horreur. Je trouve d'ailleurs que le format "chronique" - un aspect dont je suis par ailleurs très friand de manière générale - se prête parfaitement à ce type d'histoire. 
Cependant, j'ai vraiment eu du mal à me sentir impliqué dans ce récit. Sans évoquer le racisme ambiant, propre à la culture américaine de l'époque, le caractère du narrateur - du moins ce qu'on en perçoit: un poil hautain et prétentieux, et surtout trop sceptique - ne me l'a pas rendu très sympathique, ce qui a peut-être de fait rendu à mes yeux l'enquête moins passionnante. Par ailleurs, je ne suis pas un très grand fan de l'ambiance très "américaine du début XXe" qui se dégage du texte, sans pouvoir expliquer vraiment ce point. Et puis surtout, quel dommage que le soufflé retombe si vite! Une jolie sensation que Lovecraft n'a pas été jusqu'au bout de ce qu'il aurait pu faire, en somme.

A lire pour qui voudrait s'intéresser à Lovecraft et au mythe de Cthulhu, mais davantage pour ce qu'il représente que ce qu'il est vraiment. L'ambiance est là, la mythologie aussi, mais également la sensation d'un travail non abouti que Lovecraft n'aurait pas eu envie d'achever. Il paraît cependant que c'est un des moins bons de ce que l'auteur a écrit autour du mythe, je n'ai donc pas dit mon dernier mot, Howard Philips!

Si ce fanart monstrueux signé Richard Luong vous plaît,
je vous invite à visiter son blog ou sa superbe galerie DeviantArt!

La malédiction qui s'abattit sur Sarnath (1919)


En guise de dessert, un second texte de Lovecraft, plus ancien, vient accompagner L'Appel de Cthulhu - et je me demande encore ce qu'il fichait là. Non pas que la novella en elle fût mauvaise, mais j'ai eu du mal à y trouver de l'intérêt, d'autant qu'elle n'est en presque rien liée au mythe de Cthulhu, et ne dépasse même pas la douzaine de pages. A vrai dire, je pense que les éditeurs ont voulu montrer que Lovecraft n'était pas parti de rien pour inventer sa mythologie, mais dans ce cas, il aurait été à mes yeux plus judicieux soit de placer ce texte en premier, soit d'en joindre d'autres du même genre. Car si dans ce récit, la chute de Sarnath et le côté mythique de la civilisation rappellent certains passages de L'Appel de Cthulhu, le texte a plus des allures de prologue qu'autre chose. En fait, j'imaginerais parfaitement cette légende, avec quelques modifications, s'insérer dans un texte comme L'Appel. Ce qui plombe vraiment à mes yeux l'intérêt de La malédiction, c'est que ben... il ne s'y passe pas grand-chose, en fait! Très rapidement, au tout début, le contexte est resitué, on évoque l'élimination d'une civilisation d'anciennes créatures qui ressurgiront des flots aux toutes dernières pages pour se venger en détruisant la cité de Sarnath, si rapidement que c'en est presque décevant. Mais tout le reste, qui doit bien représenter trois bon quarts du récit, est dédié à la description de Sarnath... Et c'est un peu long, et fort peu intéressant, puisqu'elle ressemble à n'importe quelle cité idéalisée de n'importe quelle légende/ mythologie/ conte... 

En résumé, si le texte permet de jeter un oeil sur les travaux pré-Cthulhu de Lovecraft, il paraît bien anodin après L'Appel de Cthulhu, surtout que même pris à part, le texte n'a que peu d'intérêt. Peut-être aurait-il gagné à être placé en "prologue" de L'Appel, ou au milieu d'autres textes Lovecraftiens du même genre et de la même époque, pour un plat un peu plus consistant.

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Je ne l'ai appris que récemment, hier en fait pour tout vous dire, mais il paraît que "l'horreur lovecraftienne" est considérée comme un sous-genre de la fantasy. Ce qui me permet de faire participer cette petite chronique à la deuxième édition du Challenge Dark Fantasy
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4 commentaires:

  1. J'avais aussi tenté l'expérience récemment, et la déception fut grande.
    Le recueil chez "J'ai Lu" qui s'appelle "Le Mythe de Cthulhu" (nom donné uniquement par l'éditeur finalement) n'a que 2 nouvelles qui en parlent vraiment, le reste est un peu flou, juste du fantastique horreur. J'avais zappé la moitié des nouvelles parce qu'elles m'énervaient dans leur débordement de misogynie, machisme et racisme ^^
    Autant dire que ce coco est agréable à lire.

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    1. Oui, la mysoginie, le machisme et le racisme sont indissociables de la culture américaine du XIXe - début XXe, et malheureusement, ça vient plomber pas mal d'oeuvres et d'auteurs de cette époque, Lovecraft compris. Je comprends parfaitement que ça ait pu te gêner durant ta lecture!

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  2. De Lovecraft je n'ai lu qu'un librio à 2€, donc sans doute pas assez pour une idée juste, mais je l'avais trouvé assez fade.

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    1. Il est vrai que ce qui est véritablement intéressant, c'est davantage (selon moi) tout l'univers qu'il a mis en place que véritablement son écriture...
      Après, tout dépend du texte que tu as lu, et puis surtout de la traduction, qui chez ce genre d'auteurs peut véritablement plomber tout le récit si elle ne suit pas!

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