dimanche 30 novembre 2014

Retrouvailles avec un fameux guerrier mutant aux cheveux blancs

La Saga du Sorceleur, tome 4: La Tour de l'Hirondelle, de Andrzej Sapkowski
Note: la numérotation concerne l'édition Bragelonne, celle que j'ai lue, qui est différente de celle en cours chez Milady, laquelle fait de ce tome le sixième, et non le quatrième (les deux volumes de nouvelles étant considérés comme des tomes à part entière)



Le sorceleur Geralt de Riv poursuit son périple vers le Nord pour retrouver la jeune Ciri avant qu'elle épouse l'empereur de Nilfgaard. Ses fidèles compagnons, Jaskier le barde, Milva l'archère, Régis le vampire et Cahir le Nilfgaardien font route avec lui. Refusant les lois de la Loge des magiciens, Yennefer décide quant à elle de faire cavalier seul pour sauver celle qu'elle considère comme sa fille. Tandis que les traîtres se dévoilent, les doutes sur la véritable destinée de Ciri hantent tous les esprits. Surtout qu'elle est aux mains d'un monstrueux chasseur de primes...
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"Ce ne sont pas les hommes mauvais et malhonnêtes qui plongent, oh non! Ceux-là, ils sont très déterminés et n'hésitent pas à faire plonger dans le gouffre les gens respectueux de la morale, honnêtes et nobles, mais maladroits, hésitants, et plein de scrupules."



Infos complémentaires:
Titre original:  Wieża Jaskółki (1997)
Série: La Saga du Sorceleur (Wiedźmin)
Traduction par Caroline Raszka-Dewez
Edition: Bragelonne (2010)
430 pages


La bouille de Watson l'auteur
C'est toujours avec un plaisir à peine dissimulé que je me replonge dans les aventures du Sorceleur Geralt - que ce soit en jeu vidéo ou en livre, d'ailleurs. Cela faisait pratiquement huit mois que j'avais terminé Le Baptême du Feu, il était donc temps que j'attaque la suite. J'avoue que j'ai eu un peu de mal à me remettre dans le bain, au début: il faut dire que le laps de temps ayant été plutôt important entre les deux lectures, j'ai dû me remémorer beaucoup de points que j'avais oublié, et La Tour de l'Hirondelle n'aide pas beaucoup, puisqu'on rentre directement dans le récit. Et puis finalement, le charme a opéré de nouveau, et mon addiction à la saga s'est réveillée d'un coup.  

Cela va sans dire, je suis toujours autant conquis par la plume de Sapkowski, qui parvient à me captiver même lorsqu'il ne se passe pas grand-chose. Sapkowski brouille les pistes, multiplie les points de vue et les intrigues, il va même jusqu'à ralentir l'action pour étoffer le background, bref, il s'amuse avec son lecteur, et il le fait ma foi fort bien! Il livre un récit sans temps mort - et non, je ne considère pas les moments de calme comme des temps morts - mené tambour battant du début à la fin. Il y a de l'action, mais pas trop, du suspense, des intrigues politiques, des anecdotes en tous genres, des relations qui s'étoffent, un méchant pas sympa, bref, de tout et en bien dosé.

Leo Bonhart, par JustAnoR
Plus que jamais cette fois, le récit est consacré à Ciri et à son devenir. On la retrouve ainsi opposée à un chasseur de primes plutôt sadique nommé Bonhart, qui ferait passer Boba Fett pour un enfant de choeur. Ce dernier fait figure d'adversaire redoutable face à la jeune fille, et j'ai adoré le détester. Triss et Yennefer ont également droit à une apparition le temps d'un long chapitre, dont le dénouement laisse présager de la suite.

Du côté de Geralt, le groupe poursuit sa quête. On ne s'attarde pas beaucoup sur eux - contrairement à Ciri - ce qui peut parfois donner l'impression que leur aventure stagne un peu. Sapkowski se concentre en fait surtout sur la vie de groupe, qui suit tranquillement son cours. Une nouvelle venue fait d'ailleurs son entrée, une jeune fille péchue nommée Angoulême, qui n'a pas sa langue dans sa poche mais qui m'a beaucoup plu. J'adore toujours autant Régis le Vampire et ses réparties, et si j'ai parfois un peu de mal avec Jaskier, le pauvre barde me plaît de plus en plus.


Par ailleurs, le personnage de Cahir, le jeune Nilfgaardien, que je n'appréciais jusqu'ici pas des masses, a lui aussi finalement trouvé grâce à mes yeux dans cet opus. Il est même parvenu à me toucher, par moments, et j'ai beaucoup aimé le duo qu'il forme pour un court laps de temps avec Geralt. Une espèce d'étrange relation quasi-silencieuse se tisse entre ces deux-là, un mélange indescriptible d'amitié, de répulsion, de crainte et de respect mutuel, qui a quelque chose de fascinant et d'émouvant à la fois. Deux hommes de la même trempe, des guerriers, à la fois semblables et très différents, peu loquaces, mais à l'objectif similaire, qui peinent à se comprendre mais cherchent malgré tout à se rapprocher l'un de l'autre. C'est finalement assez dommage que l'on ne s'attarde pas davantage sur leur duo, qui aurait gagné à avoir plus de temps d'antenne.

Un jouli n'artwork réunissant Ciri et Cahir, intitulé "An unfulfilled dream", signé ellaine

Mais le vrai couple-phare de ce tome, c'est celui formé par le vieil ermite Vysogota et Ciri. Vysogota m'a plu, normal, c'est un collègue. Quant à Ciri, plus vraiment adolescente, mais pas tout à fait adulte, elle a à lui opposer toute la fougue de sa jeunesse. La jeune princesse rebelle et pleine d'énergie, le vieil homme désabusé qui a fui son ancienne vie; deux personnages en totale opposition que le destin a amenés à se
Les adieux de Vysogota et Ciri (steamey)
rencontrer. C'est un réel plaisir que de les voir se disputer pour un rien, s'envoyer des piques, ou tout simplement au coin du feu, en train de se raconter des histoires, comme un grand-père et sa petite-fille. Ça peut certes paraître un peu "cliché" comme duo, mais moi j'affectionne beaucoup ce genre de relation dans les récits, qui ont le don de m'attendrir comme un caramel un peu trop mou. Par ailleurs, Ciri arrive assez tôt dans le marais où vit Vysogota, et ne le quitte que très tard: donc même si l'histoire est entre-coupée par le récit que fait la jeune fille de tous les évènements qui l'y ont amenée et l'avancée du groupe de Geralt, leur relation a le temps de s'étoffer amplement.

Dans un registre différent, l'autre élément qui m'a marqué dans ce tome, c'est l'aspect politique qui est encore plus présent ici - on sent venir les complots et grosses confrontations finales! - et je dois dire que c'est loin de m'avoir déplu, même si l'absence de carte officielle rend le tout parfois difficile à suivre, puisqu'il faut constamment garder à l'esprit la disposition de tous les pays par rapport aux autres et les relations entre tel ou tel personnage important dont parfois seul le nom est cité. J'attends en tout cas de voir comment les choses vont se dérouler à tous les niveaux - la façon dont les Royaumes du Nord vont contrer Nilfgaard, le devenir de Ciri et Geralt, la fin de l'Arc Yennefer/Triss... C'est donc avec plaisir et sans doute très bientôt que je m'attèlerai à la suite, mais aussi la fin, de la Saga. La fin d'une aventure littéraire, que j'aurais suivie pendant près de deux ans et demi, et dont le terrain est parfaitement préparé par cet opus.

La bande de Geralt (Veganya) Allez, sorceleur, arrête de
faire la tronche et viens manger un morceau!

Bilan des courses


J'ai tout simplement adoré ce tome! Passé le petit temps d'adaptation nécessaire, dû au trop important laps de temps avec la lecture du tome précédent, j'ai retrouvé avec plaisir la plume de Sapkowski, son univers et ses personnages, pour une nouvelle aventure haute en couleur, avec action, intrigues et tout le tintouin. Sans doute la dilution de l'intrigue et le ralentissement de la quête de Geralt au profit de Ciri et de l'étoffement du background et des relations entre les personnages ne plaira-t-il pas à tout le monde, mais moi, une fois de plus, j'y ai trouvé mon compte. Monsieur Sapkowski, merci je suis conquis!


(Je ne résiste pas à l'envie de vous mettre un autre artwork que j'ai trouvé) 
Ciri speaks with Vysogota, par Miriamele Tremere
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Si la série peut évidemment être classée en "Dark fantasy", on note également de nombreuses références nordiques; mais surtout, un long passage - environ un bon dixième du tome! - avec Triss et Yennefer se déroule sur les îles Skellige, dont la culture est clairement basée sur celle des norrois (ou les vikings, si vous préférez). Cela me permet donc de faire concourir cette chronique non seulement pour le Challenge Dark Fantasy de Zina, mais également pour le Challenge Vikings du Vampire aigri!




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