vendredi 19 septembre 2014

Limonade-BD: Merlin II: la suite, ou l'histoire d'une déception.

Merlin, tome 2: L'éveil du pouvoir (Bande-dessinée)
Note: vous pouvez accéder à la chronique du tome 1 en cliquant ici.

Dès la couverture, tu ne sais pas vraiment
pourquoi, mais ça sent un peu le coup foireux...



Suite à son entretien avec les druides, Merlin poursuit son initiation, tandis qu'en Ys, un grand pouvoir s'éveille...
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"Tu veux connaître l'avenir, jeune Merlin? Ouvre les yeux, et l'avenir viendra à toi!"

Infos complémentaires:
Série: Merlin (II)
Auteurs: Istin (scénario), Lambert (dessin), Stambecco (couleurs)
Edition: Soleil, collection Celtic
Nombre de pages: 48







Le tome 2, en revanche, c'est un peu l'équivalent bédé-esque de la suite un peu minable à petit budget, sortie direct en VHS (même pas en DVD, vous imaginez!) du blockbuster de l'été. Et le pire, c'est qu'il essaye de faire mieux - ou plus spectaculaire, en tout cas. 
Du coup, forcément, ça tombe un peu à l'eau.

Non, non, pas ce Père Blaise-là.
Dans ce tome, on retrouve donc Merlin là où on l'a laissé, désormais à la tête de l'Ordre des Druides... Ah non. Tandis que Ahès poursuit ses petites magouilles dans le royaume divin avec Xersès-Duana, Merlin poursuit son initiation aux côtés de Père Blaise. Accompagnés de Maëlle, ils parcourent une Bretagne ravagée par la volonté des Dieux, jouant les gérisseurs dans les villages qu'ils traversent. Mais bientôt, le véritable pouvoir de Merlin lui est révélé, et le jeune homme devra faire face à son destin, qui le mènera jusqu'aux terres du monde magique.

Apparemment, quelques années se sont écoulées depuis la fin du tome un. Peut-être deux ou trois ans, je dirais. Merlin est censé être devenu "chef" des Druides, mais j'ai la désagréable impression que cette partie de l'intrigue, qui était l'un des enjeux de "La colère d'Ahès" est complètement passée à la trappe. De même que les conflits qui déchirent les partisans de l'"Ancien" et du "Nouveau" Cultes, et qui sont seulement mentionnés ici. C'est un peu dommage, car ç'aurait pu être des éléments intéressants à développer. Niveau développement de perso, c'est pas non plus la folie. Merlin, adolescent, qui joue à Jésus dans les chaumières en guérissant les aveugles et les lépreux, c'est très bien, mais il commence aussi à se rebeller contre l'autorité de son tuteur et maître. Un point intéressant, mais qui, là non plus n'a pas été à mes yeux suffisamment développé. Dommage, donc.

Suite à petit budget oblige, ça pêche également au niveau visuel. Là où le premier tome offrait des images fines et détaillées, à défaut d'être toujours très jolies, dans ce tome-ci, le trait devient grossier, la colo fait parfois vraiment datée (Héban a passé la main à Stambecco) et les personnages changent de tronche d'une
vignette à l'autre.
Heureusement, par moments, Lambert se rappelle que ses planches sont publiées, et nous offre quelques belles images, nottamment durant les dernières pages, où l'on découvre avec Merlin le monde magique. Ici, le trait plus affirmé convient davantage à mes yeux à cet univers de dieux et créatures de la mythologie celtique.

On a tout de même parfois droit à quelques bonnes surprises, comme par exemple cette planche, 
une des meilleurs de ce tome (ce qui au fond n'est pasbien compliqué) que je trouve très belle.
Si Ahès a dans ce tome perdu en prestance, elle conserve donc néanmoins de bons passages.
Au niveau de l'écriture, j'ai été aussi pas mal déçu. Plutôt mollassone, pas de réelle logique dans l'enchaînement des "chapitres", on alterne entre passages ridicules et moments gênants; je pense en particulier au moment où Merlin use de ses pouvoirs pour confondre un juge qui cherchait à les condamner, lui, sa mère Maëlle et Père Blaise. La façon dont se déroulent les évènements est vraiment maladroite - et le gros plan sur les mamelons de Maëlle (véridique!) n'était pas particulièrement nécessaire. M'enfin, simple avis personnel. Il y a aussi ce fameux passage dans lequel Merlin se met à léviter en mode super Saiyan en récitant des prophéties avant de se la jouer préquelle de Jésus-le-Sauveur pour guérir tout le monde. J'ai trouvé ça particulièrement mal amené, avec des images qui prêtent plus à rire qu'autre chose.

On a aussi droit à tous les clichés qui nous avaient à peu près été épargnés dans le premier tome;

Ahès, par Jacques Lamontagne,
dessinateur de la BD "Druides"
(entre autres)
Ainsi, Ahès, qui dans le tome précédent n'était pas loin d'obtenir le rôle - indissociable de tout scénario se voulant "mature" écrit par un homme - de "bonnasse aux gros seins" (excusez le peu d'élégance du terme) remplace cette fois Kernaëlle au pied levé. Elle quitte donc ses allures de grande déesse, pour adopter une tenue davantage de circonstance - à moitié dénudée, décolleté plongeant, poitrine rembourée, mascara, oh et puis oubliez la coiffure sophistiquée, aussi; un jour Ahès s'est dit qu'elle en avait marre de ressembler à une aristo, du coup, pour se rebeller, elle a arrêté de s'habiller et de se coiffer. La crise d'adolescence arrive tard chez les Dieux.

Maëlle n'est pas loin non plus de ravir la première place de ce classement. Si, si, vous avez bien lu: Maëlle. La puritaine dont l'entourage se résume à un prêtre et à son prore marmot. Et qui n'hésite pas à revêtir une armure pour défendre tout le monde. Ben cette fois-ci, elle porte des robes au décolleté plongeant, et a tronqué son armure complète pour un soutien-gorge en métal, une mini-jupe en lattes et une épaulière. Parce tout le monde sait que c'est beaucoup plus efficace qu'une armure complète, surtout si on laisse son nombril à l'air. Ah, mais c'est vrai, j'oubliais que maintenant elle porte un diadème aussi. Pour se protéger la tête.

Le célèbre "Merlin" de Louis Rhead.
Vieux, pour changer.
Si on aborde Maëlle, il ne faut pas oublier non plus le co***rd prétentieux qui sort de nulle part et s'incruste dans la vie de Maëlle sans aucune raison valable, juste pour avoir sa dose de nichons quotidienne. Et évidemment, Maëlle, même si elle est bien vénèr, au lieu de lui foutre un bon gros coup dans les parties et de l'envoyer se faire voir chez les grecs, accepte son défi, dans une scène affreusement clichée et maladroite, le vainc, le soigne et... couche avec lui.
C'est vrai, après tout: au fond, pourquoi avoir par tous les moyens tenté de "rester pure" pendant près de 30 ans, et jouer ensuite les femmes-guerrières toujours sur la défensive, si ce n'est pour se jeter dans les bras du premier conn vagabond venu qui a cherché à la tuer deux heures plus tôt! Quoi? C'est pas comme ça que ça marche en vrai? Tsss... Vous ne comprenez vraiment rien aux scénarios clichés êtres humains...

Comme petit bonus dans la galerie, notez que Xerxès s'est échappé du tournage de 300 le temps de deux courtes apparitions*. Merci Xerxès. 


Bon, je vais arrêter là le massacre, c'est peut-être pas si mauvais que ça au final, et ça se laisse lire, quoi que j'en dise. Mais voilà, ce tome n'est clairement pas au niveau du premier, et ce à pratiquement tous les points de vue. "Pratiquement", parce que j'ai tout de même un peu d'espoir au vu des dernières pages (qui ne sont pour autant pas mieux dessinées que les autres, faut pas rêver non plus), où Merlin, emmené dans le monde magique par Ahès, se voit remettre plus sérieusement le rôle de "nouveau Messie" de la mythologie celtique, avec plétore d'armées sous ses ordres, par opposition au sauveur hippie multiplicateur de pains qui fait des siennes de l'autre côté de la Méditerranée. Ça laisse présager de beaux affrontements, des conflits de pouvoir, des trahisons, ce genre de bêtises, classiques mais qui fonctionnent quand c'est bien fait.

Le mot de la fin


Une suite bien décevante sur presque tous les points, donc, qui accuse surtout la comparaison avec le tome précédent. Il est d'autant plus dommage que cette grosse baisse de qualité arrive au moment où l'histoire commençait juste à prendre plus d'ampleur! Peut-être y trouverez-vous votre compte, en tout cas, pour moi la pilule est passée difficilement. J'ai bien quelques espoirs pour les tomes suivants, mais à moins d'une grosse surprise, je doute - pour le moment - de me replonger dans la série avec un très grand intérêt.

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* Qui sait, je tiens peut-être là mon explication du "faible budget": alors que dans le tome 1 tout était passé dans les effets spéciaux, ici, les trois quarts ont dû être utilisés pour faire venir ce guest - la moitié du quart restant étant partie dans les opérations chirurgicales visant à améliorer la plastique d'Ahès et de Maëlle.

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Cet article de râlage intensif constitue donc ma seconde participation pour le Challenge Légende Arthurienne, organisé par Auudrey!

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Et bien évidemment, la locution latine du jour, histoire de terminer sur une note culturelle:

Retro pecat et rex domini.


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